ALBERT KABEYA TSHIKUKU
Expert Consultant en
Informatique et Télécommunications
LÉONARD KABEYA TSHIKUKU
Professeur, Faculté des
Sciences Economiques et de Gestion,
Université de Kinshasa
Sens du propos
Cet article est un dossier scientifique destiné au grand public. Il
vise à faire connaître aux décideurs et à leurs gouvernés, les atouts liés aux Nouvelles Technologies de l’Information et
de la Communication (NTIC) en termes de progrès de l’économie et de la
société. Les NTIC appartiennent à la partie de l'économie où l'on ne fabrique
pas de biens matériels (comme du savon, de la dentifrice, des véhicules
automobiles, ou des produits textiles). Au contraire, elles relèvent d'un
secteur productif transversal dont les biens sont immatériels (des biens dans le genre "soins médicaux",
"leçons en classe", "information", "paix et
sécurité", "communication", "transport"...). Elles
appartiennent donc à l'autre versant de l'économie, appelée économie immatérielle, et, plus
spécifiquement à la sous-catégorie de l'économie
numérique.
L'économie numérique repose sur la micro-électronique, l'informatique et les
télécommunications. Elle regroupe les techniques de numérisation et de
diffusion à distance, par des canaux immatériels, des données d'information,
notamment des sons et des images. Les NTIC constituent un mode de vie des
sociétés modernes, un fait de civilisation qui révolutionne la vie des
multitudes, comme l'ont fait jadis, sur la société et la condition humaines,
l'outil de pierre (taillée et, plus tard, polie), la production du feu, la
découverte et l'utilisation des métaux, la découverte et la pratique de
l'agriculture, la découverte et l'utilisation de l'écriture, l'invention de
l'imprimerie, de l'électricité, de l'énergie thermonucléaire, des ondes
hertziennes, du télégramme et du téléphone, de l'électronique, des circuits
imprimés, des puces électroniques, de l'ordinateur portable...
Au 20è siècle, l'économie mondiale s'est intégrée et
densifiée. Les progrès des télécommunications et de l'informatique y ont pris
une large part. La mobilité des capitaux, des biens et des personnes a eu
raison des obstacles physiques et des barrières culturelles. L'économie immatérielle en général, et l'économie numérique en particulier, en
sont largement responsables. Ce sont elles qui, à ce jour, en touchant au cœur
même de l'existence des multitudes, conditionnent, orientent et dimensionnent
le destin de toute l'humanité. Quel effet cela vous a-t-il fait de savoir, pour
la toute première fois, que grâce à la télémédecine, un chirurgien japonais au
Japon peut opérer un malade de cancer guatémaltèque dans un hôpital au Pérou ?
L'économie numérique demeure cependant mal connue des dirigeants et des
peuples : ses mécanismes et ses retombées sont difficilement perceptibles. Pour
être transversaux et diffus, ils n'en remodèlent pas moins notre existence
collective, spécifiquement en changeant de fond en comble notre rapport au temps et à l'espace.
Au-delà du grand public, le présent article s’adresse aux décideurs
politiques, aux entrepreneurs, aux enseignants et formateurs, aux étudiants,
aux leaders d'opinion, ... bref à l’ensemble des acteurs opérant dans les
diverses sphères économiques et sociales de la RDC. D’une manière ou d’une
autre, à un degré ou à un autre, ces élites sont appelées à s'instruire sur les
NTIC et à en faire, comme partout ailleurs dans le monde, un des principaux
leviers du développement national.
Bien plus, le présent dossier indique quelques pistes vers des choix
politiques susceptibles de garantir à l'économie nationale et à la société
congolaise, par delà une résistance accrue aux chocs intérieurs et extérieurs,
une intégration réussie à la marche collective de l'humanité. De par nature,
les révolutions sont manichéennes : les peuples en sont ou bénéficiaires, ou
victimes.
Plan de l’article
1.
Aperçu historique et état des
lieux des NTIC, dans le monde et en RDC
2.
Les NTIC dans certains secteurs de
la vie : ce qui est possible et ce qui est réel en RDC
3.
Résilience de l'économie
congolaise : les atouts avec les NTIC
I
APERÇU HISTORIQUE ET ÉTAT DES LIEUX EN RDC
|
Kinshasa, Boulevard du 30 juin |
Il n'est pas aisé d'apprécier le tournant qu'imposent les NTIC à toutes
les nations − et en particulier à la RDC − sans passer par une brève rétrospective
sur cette révolution technologique.
On attribue au vivant le souci et le réflexe, depuis ses origines
lointaines, de collecter et d'enregistrer l'information. L'efficacité avec
laquelle des générations d'hommes ont géré leur existence, en temps de paix ou
en temps de guerre, dépend de leur capacité à maîtriser l'information et à
communiquer. Comment gagner une guerre sans information sur les atouts, les
contraintes, les failles et les stratégies de l'adversaire ? Comment négocier
la paix si l'on ne peut communiquer entre protagonistes. L'information et la
communication sont donc à la base de la puissance et l'efficacité des
groupements humains. De même, elles constituent le principal atout de leur
cohésion, de leur solidarité et de leur efficacité sur leur environnement.
Tam-tam, cloche et divers autres instruments à percussion appartiennent
au plus vieil arsenal des instruments de communication de toute l'humanité,
depuis les temps immémoriaux. L'invention de l'écriture dans les vieilles civilisations égyptienne et sumérienne a
été une révolution, à l'origine de l'émergence de plusieurs civilisations
antiques (mésopotamienne, chinoise, inca, indo-européenne, ...). Avec
l'écriture, la capacité à diffuser et à conserver les connaissances, les techniques
et les arts, a été étendue. C'est à ce tournant qu'il est convenu de limiter la
préhistoire, et de faire démarrer l'histoire de l'humanité. La création de l'imprimerie,
au 15ème siècle, a constitué un autre grand tournant. Le télégraphe
(transportant le code morse en impulsions électriques), le téléphone
(transportant la voix réelle sur les ondes hertziennes à la vitesse de la
lumière) et le phonographe (il est de la fin du 19ème S) (stockant
des messages et des chansons sur des sillons), ont vu le jour au cours des 30
dernières années du 19ème siècle, au moment du passage en Europe de
la petite industrie aux grands combinats industriels.
Le 20ème siècle a connu un progrès décisif en matière de
technologies de l'information et de la communication. Les théories des systèmes
ont envahi tout l'univers des connaissances, impliquant les théories de
l'organisation et celles de l'information. Des instruments et des techniques
spécifiques ont porté ces progrès : l'ordinateur "cablé" et sa carte
perforée de 80 colonnes (1943-1966), l'ordinateur à transistors et à lampes
cathodiques, utilisant comme support de mémoire la bande magnétique (avec un
accès exclusivement séquentiel aux données d'information), et plus tard le disque
dur (avec, cette fois-ci, un accès direct et sélectif à des données
d'information souhaitées), et enfin des puces électroniques, des processeurs et
des logiciels de plus en plus puissants.
Toutefois, l'étape la plus décisive (à ce jour) de la révolution des
TIC est venue plus tard, à partir de la décennie 1980. La jonction est
intervenue entre l'informatique et les techniques de communication. En clair, l'image
et le son ont été transformés en des données numériques, et donc en des
intrants que l'ordinateur, sans cesse miniaturisé et puissant, a coutume et
capacité de stocker en un volume phénoménal, de croiser de mille manières,
d'affecter à d'innombrables usages, et de diffuser dans toutes les directions,
de façon sécurisée et à la vitesse de la lumière ... L'informatique a donc pris
un nouvel essor grâce aux circuits imprimés que les constructeurs informatiques
ont mis sur le marché. La télévision, le Minitel et l'internet puis les télécommunications mobiles ont associé l'image au
texte et à la parole. "Sans fil", l'internet et la télévision deviennent accessibles sur le téléphone
portable qui, par ailleurs, fait office d'appareil photo.
Avec l'explosion de l'électronique "grand public", l'ère de
la numérisation et de la miniaturisation avait sonné ! Grâce aux autoroutes de
l'information (ou le web), le temps
et la distance ont cessé d'être ce qu'ils ont toujours été au cours de la
longue histoire de l'humanité. Sur nos tablettes et autres i-pads, ces obstacles naturels, de tous temps réputés
"infranchissables" pour la dissémination des connaissances et de
l'information, sont aujourd'hui vaincus, et même progressivement évacués de la
mémoire des jeunes générations.
Depuis le dernier quart du 20è siècle, c'est une grande
révolution dans notre mode de vie et dans notre ressenti du rapport qui nous
lie au temps et à l'espace. C'est donc cette révolution qui, ça et là, a pris
le nom rébarbatif (et provisoire, espérons-le) de NTIC (Nouvelles Technologies
de l'Information et de la Communication).
Les NTIC ont investi toute la planète, bien qu'avec une performance et
une vitesse graduées d'un pays à un autre. Elles participent à l’accélération
de la croissance des économies, au progrès des connaissances et au
développement des peuples. Le rythme accéléré des innovations au cours des 50
dernières années ne peut passer inaperçu. Le monde a connu une dynamique
prodigieuse d’inventions transversales dans tous les secteurs (biologie,
agriculture, industrie, éducation, management, services ...).
Il est impensable à ce jour de travailler sans un ordinateur connecté
au réseau Internet. En effet, les
NTIC, sous toutes leurs déclinaisons (fixes et mobiles), font partie intégrante
de la culture de ce 21ème siècle débutant. Même les milieux ruraux
sont envahis par la présence croissante des téléphones mobiles et des radiotéléphones,
de plus en plus "intelligents" et "multifonctions".
Il est utile de faire le point sur les possibilités qu'ouvre cette
révolution, de même que sur les avancées réelles - et les résistances et les
obstacles - qui ponctuent l'évolution de
la société et de l'économie congolaises.
II
LES NTIC EN RDC :
CE QUI EST POSSIBLE ET CE QUI EST
RÉEL
|
Ministère des Finances : Réunion
sur la mobilisation des recettes |
Le tout premier besoin auquel le présent article se propose de
rechercher une solution avec le concours des NTIC est le besoin de garantir et
de renforcer le développement économique et socioculturel en RDC. Trois facteurs historiques soulignent le
poids de ce besoin, maintenant.
Le premier facteur est la
précarité de la croissance économique en RDC. En effet, depuis 1909 à 2015, les
épisodes historiques pendant lesquels le pays a bénéficié d'une croissance
économique sont de plus en plus courts, et de plus en plus espacés. En effet,
le Congo a connu vingt ans de croissance, de 1909 à 1929, suivis de seize
années de dépression "mondiale" (1930-1946). Puis, le pays a
bénéficié d'une croissance de dix ans, de 1947 à 1962, suivis de quatre années
de récession (1963-1966). Ensuite vint une autre période de croissance, de 1966
à 1973, suivie de trente longues années de récession-régression (1974-2003)...
Quelle sera la durée de la croissance économique enfin retrouvée depuis 2003 ?
Cette question préoccupe tous les milieux congolais, où chacun croise les
doigts : "pourvu que cette sacrée embellie économique dure !". La
durée de la croissance ? Les dirigeants y voient la promesse même de
l'extension des bienfaits économiques à l'ensemble de la population. Et
celle-ci ne demande qu'à croire à cette promesse d'inclusivité !
Le second facteur est la
trop forte dépendance de la croissance économique actuelle vis-à-vis des secteurs
d'extraction (mines, énergie et forêt, avec une prépondérance croissante des
mines). L'évolution se dessine résolument vers la monoproduction et la
mono-exportation minières. Elle ne porte guère de promesse de diversification
économique. La peur de voir la croissance déchoir est donc totale et même
totalement justifiée, tant l'économie du pays est de plus en plus portée sur
une base qui se rétrécit sans cesse au cours des 50 dernières années !
Le troisième et dernier facteur
est lié au niveau exceptionnellement élevé et à la longévité du chômage et du
sous-emploi dans le pays. Ces maux refusent de reculer, y compris devant une
durable et relative "stabilité du cadre macro-économique" (15 longues
années, de 2003 à 2017 et peut-être même légèrement au-delà : ce sera un record
de longévité historique !).
Alors, quelle peut être la contribution éventuelle des NTIC dans la
durabilité tant souhaitée de la croissance économique en cours ?
Contentons-nous d'examiner la question secteur d'activité par secteur
d'activité, le regard étant rivé sur certains secteurs qui sont demeurés
longtemps à la traîne sur le continent africain, et plus spécialement en RDC :
agriculture, éducation et formation, santé, petites et moyennes entreprises
nationales (PME), finances et monnaie, et gouvernance du pays.
2.1 Agriculture :
renforcement des chaînes de valeurs, grâce aux NTIC
|
Marché agricole RDC |
Le secteur agricole est en pleine mutation dans les pays développés. Il
bénéficie des NTIC pour se spécialiser : l’agriculture de
« précision » remplace insensiblement l’agriculture
« industrielle ».
En Afrique et plus spécialement en Afrique sub-saharienne, certains
pays comme le Kenya ont investi dans les plateformes informatiques et télécoms
capables de créer et de drainer l’information éducative, nécessaire à
l’optimisation, au développement et à la croissance soutenue de la production
agricole, spécialement dans les zones rurales et péri-urbaines. L’accès facile
des producteurs aux cours des marchés de biens agricoles, aux informations
météorologiques, et aux systèmes informatisés de gestion de la chaîne
logistique, a considérablement réduit les pertes des exploitants et encouragé
les initiatives d’amélioration de la productivité. On s'éloigne du gigantisme
et du vacarme des engins de labour, des semoirs et épandeuses d'engrais, des
moissonneuses-batteuses et des fermes semencières. On s'installe dans la
précision des données d'information sans cesse comparées : variétés, semences,
sols de culture, caprices météo, marchés, approvisionnements ... sont examinés,
jaugés et croisés avec un souci permanent d'efficacité, d'opportunité et de
gain en temps.
Quelques
logiciels téléchargés sur les téléphones mobiles des fermiers et exploitants
agricoles ont provoqué des avancées significatives dans le monde rural du
Kenya, de l’Ouganda, du Ghana, du Nigeria et du Sénégal, notamment. En ayant
entre leurs mains l’accès à l’information décisionnelle en temps réel, les facilités du "mobile payment" ou du « mobile banking", des exploitants agricoles ont réussi à
accélérer près de 3 fois le temps d’accès à leurs revenus. Ce fait a raccourci,
à leur profit, la chaîne logistique et libéré opportunément les ressources pour
financer les fonds de roulement : plus que jamais avant, l'information est mise
au service de l'efficacité.
Grâce à la
téléphonie mobile, l'accès à la base des données d’information a permis de
décupler les revenus de différents exploitants agricoles. Dans les 4 pays cités
plus haut, l’étude rédigée en 2013 par le Cabinet Dalberg sur l’impact de l’Internet en Afrique,
fait état d'un taux de croissance allant de 9 à 13% de moyenne annuelle des
revenus agricoles, au cours des 4 années précédentes. En effet, la connaissance
des prix pratiqués sur les marchés locaux et internationaux a poussé les exploitants
agricoles à rechercher une voie alternative pour réduire leurs coûts de
production. Ainsi, pour certains marchés agricoles en Afrique, cette démarché a
contribué à augmenter les revenus des producteurs. Les exemples sont légion.
Limitons-nous à relever les cas de Gomme de Manobi au Sénégal : les revenus ont
grimpé de 50% en 4 ans, grâce à la plateforme internet d’information Xam Marsé (Dalberg :
TIC et accès des ruraux à l’information :
l’exemple du Xam Marsé de Manobi au Sénégal, in Cahiers de Netsud, Dakar, mai 2011,).
Toutes ces
expériences heureuses, où l'information est élevée au rang d'un investissement
rentable, demeurent transposables avec succès. Que faire en RDC ? Sinon étendre
les NTIC au vaste monde rural, aux fins de faire bénéficier de tous ces
bienfaits aux exploitants agricoles, et au pays tout entier, tant les revenus
ruraux sont en recul depuis des décennies.
1. Le
projet de téléphonie rurale en RDC
doit être repensé, dans une concertation tripartite entre le Ministère des
PTT-NTIC, le Ministère de l’Agriculture et l'Autorité de Régulation dont un
réveil rapide à ces grandes questions de développement national est à
souhaiter. Car, plus de 5.000 villages en RDC et de 900.000 ménages agricoles
ne sont pas encore couverts par les 7 opérateurs GSM qu’on laisse s’agglutiner
dans les 14 centres urbains plus rémunérateurs du pays, avec, dans leur poche,
une licence valable sur les 2.345.410 km2 de territoire national.
Pour preuve, le parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo, à 240 km seulement de
Kinshasa, capte le signal d’un seul opérateur téléphonique sur cinq, un signal
du reste désespérément faible, sur les 80 000 hectares de la ferme !
Chaque jour, et à plusieurs reprises, le directeur du parc et ses employés
doivent se déplacer sur des kilomètres pour envoyer et recevoir des appels
téléphoniques.
2. Les
décideurs gagneraient à promouvoir l'internet, fixe et mobile, dans les
campagnes, aux fins de diffuser et vulgariser en ligne des informations
critiques et des connaissances de base au profit du monde rural. À travers ce
même réseau, des campagnes de sensibilisation, d’alphabétisation, d'hygiène du
milieu et de la protection de l'environnement peuvent atteindre le pays profond
au moindre coût et en temps réel. À cet effet, le Ministère de l’Agriculture
mettrait en place "un nuage informatique" privé (un Cloud privé) destiné à donner aux
ruraux, par SMS et par internet, des informations utiles sur la météo, les
calendriers agricoles, les conditions des marchés agricoles, les circuits et
les coûts des approvisionnements (semences, engrais, insecticides et
fongicides, pharmacies vétérinaires, maladies des plantes et des bêtes,..),
etc.
3. Différents créneaux de formation agricole devraient, sur le net,
trouver des espaces de collaboration avec les exploitants agricoles, afin de
soutenir dans les campagnes les efforts d'amélioration des méthodes culturales
et pastorales, d'augmentation des revenus dans ces milieux qui constituent
autant de plages de pauvreté.
4. Le
gouvernement gagnerait à se doter d’une vision globale et d'une approche
stratégique réaliste et proactive, en matière agricole, pour aider les
entrepreneurs et les exploitants agricoles à exploiter des opportunités de
croissance et de diversification de la production agricole. Au-delà de
l'augmentation de la production agricole, de sa diversification et du
relèvement des revenus ruraux, il est impérieux de multiplier et d'allonger les
chaînes de valeur, avec pour effets
d'augmenter dans le pays la valeur
ajoutée du secteur agricole, de multiplier les emplois ruraux, de garantir l'autosuffisance
et la sécurité alimentaires, de
réduire les importations alimentaires
et la dépendance financière
extérieure qui s'y greffe, et même d'augmenter et de diversifier les
exportations agricoles avec, en prime, des rentrées en devises.
La
formation technique et managériale, la vulgarisation des connaissances,
l'information et la communication en tous les domaines, la multiplication et
l'encadrement technique et financier des exploitants du monde rural, ... sont
autant de domaines d'action dans lesquels le concours des NTIC doit être pensé
et organisé par l'État. Ce monde de compétition qui nous entoure aurait été
invivable s'il n'était pas infiniment ouvert à l'échange de l'information et
des expériences, ainsi qu'à la dissémination des connaissances. En somme
produire et communiquer les informations en amont et en aval du domaine
agricole est un investissement incontournable. Un tel investissement implique
une vision réaliste et une stratégie efficace des dirigeants dans le domaine
des NTIC. La RDC a encore du grain à moudre.
5. La réforme fiscale peut également faire partie de l'ensemble des
solutions à l’avantage du secteur agricole. En effet, la défiscalisation (ou la
baisse des droits d’importation) des appareils donnant accès à l'internet
(téléphones "intelligents", tablettes et ordinateurs) peut contribuer
à réduire les coûts d’acquisition de ceux-ci au profit des exploitants ruraux
aux revenus généralement très modestes. Ainsi donc, le coût d'acquisition de
ces équipements ne saurait être fixé par les mécanismes prétendument
"rationnels" du marché libre. Il doit, bien au contraire, relever
d'une politique volontariste visant la dissémination de l'information,
l'échange des expériences et le renforcement de la communication dans le monde
rural et à son avantage.
Les applications mobiles sont calibrées par leur facilité d’accès et
d’utilisation dans le monde rural congolais. La moitié de la population y est
déjà équipée et le train continue, essentiellement chez les femmes. Le concept
technique de « Virtual City » est employé dans certains pays
africains, pour désigner la "cité virtuelle" que devient le milieu
rural connecté par téléphone et par internet
aux centres urbains. En effet, le rapport de ces ruraux au temps et à l'espace
change du tout au tout ; comme il en va des citadins. Désormais ouverts en
permanence l'un à l'autre, leurs espaces respectifs sont sans limites, dans
leur communication extérieure et dans le ressenti qu'en ont désormais leurs
habitants. Le temps interminable que prenaient leurs deux espaces pour
communiquer entre eux a été raccourci, voire effacé. Par SMS et par internet, ruraux et citadins
communiquent en temps réels − sans exception ni de forme ni de contenu − pour les données
d'information échangées. Pour un territoire congolais si vaste qui a tant et si
longtemps souffert de son "ingérable immensité", les NTIC sont plus
qu'un soulagement : elles condensent les relations économiques et sociales sur
le territoire national désormais "sous contrôle", et en un temps
désormais infiniment "comprimé".
Par ailleurs, le projet congolais de dissémination de "parcs
agro-industriels" ouvre la voie vers une production agricole de masse.
Pour éviter de faire de ces parcs de nouvelles enclaves, un recours massif et
organisé aux NTIC est indispensable. C'est à ce prix qu'une agriculture, de
quelques rendements d'échelle qu'elle soit, deviendra capable de combler le
décalage quantitatif et qualitatif actuel entre l’offre intérieure et la
demande domestique des produits agricoles. Des tracteurs et des avions
d’épandage équipés de GPS, des caméras et postes de surveillance interconnectés
via la fibre optique, des centres de traitement de données logistiques et
économiques, ... tous ces équipements des parcs agro-industriels modernes
conforteront la stratégie du pays en matière d'autosuffisance et de sécurité
alimentaires.
L'audace du projet des parcs agro-industriels est de nature à ouvrir
l'économie du pays sur de nouvelles perspectives. Si les NTIC y étendent leurs
facilités en prenant soin de couvrir le monde rural congolais (tel que ce
processus a été envisagé ci-dessus), le Congo peut espérer raisonnablement voir
le secteur agricole contribuer à la résilience et à l'inclusivité de la
croissance économique.
2.2 Education et formation : construire un écosystème de
connaissances, grâce aux NTIC
|
Une salle de classe typique en RDC |
L’accès à l’éducation en RDC, comme pour l’ensemble des pays de la
région, constitue un défi important. Selon l’UNICEF, environ 50 millions
d’enfants en âge de scolarité n’ont pas accès à l’éducation en Afrique
sub-saharienne. La qualité de l’enseignement, l'accès à l'éducation et le
rendement interne du système éducatif préoccupent.
Avec près de 60% des moins de 25 ans, la RDC fait face à un défi rare
de démographie scolaire. Il y a peu, un plan d’investissements était en
exécution : 120 millions $USD dans la construction et la réfection des
infrastructures scolaires. Ce plan concerne plus de 1.000 écoles, dont 454 ont
été livrées fin 2015. C’est un chantier titanesque, couplé à la charge
budgétaire de la gratuité projetée des études primaires dans les établissements
publics. Le pays étant très vaste, il n'est pas aisé de rattraper un retard de
plus de 50 ans que la dynamique démographique et les normes scolaires
changeantes n'ont jamais cessé de creuser.
Bien plus, l'impératif d'une éducation de qualité appelle une vision
audacieuse de l'efficacité scolaire, notamment pour ce qui est de satisfaire − voire
d'anticiper − les besoins du marché de travail et de compétitivité des produits
congolais. Dans ce secteur scolaire, comme dans bien d'autres, les NTIC ont un
rôle de premier plan à jouer.
En effet, l’internet est
devenu le plus vaste réservoir mondial de connaissances, le carrefour le plus
important des savoirs que l'humanité ait jamais construit. Pour chaque pays
pris isolément, il est de loin moins coûteux que des bibliothèques physiques,
larges et constamment à jour, qu'il conviendrait de bâtir, d'entretenir et
d'approvisionner par dizaines, et à coup des millions. C’est pourquoi, il est
absolument nécessaire que les dirigeants prennent la mesure du défi, et
développent, pour le Congo, des réseaux d’accès "large bande en
fibre", aux fins de sortir le pays de la zone rouge où il végète.
Selon l’Union Internationale des
Télécommunications, le taux de pénétration de l’internet en 2014 ne dépassait pas les 2% de la population
congolaise, soit moins de 3 petits millions de personnes sur près de 83 millions.
L'énergie électrique et les infrastructures manquent cruellement partout dans
tous les coins du pays. À l'internet,
l'accès physique est un luxe rare et l'accès financier un cauchemar. Les
contenus locaux manquent dans ce réservoir mondial de connaissances et de
données d'information où tous les pays "crachent" sans arrêt. Au
total, la jeunesse congolaise ne connaît guère la marche du monde dans lequel
elle est pourtant appelée à se battre et à s'épanouir ; de même, le reste du
monde ne connaît guère le Congo sur lequel il a si peu de données
d'information. Autant de handicaps qui maintiennent l'école et la jeunesse du
pays en marge des NTIC et du courant mondial de communications, et plus
spécialement en dehors de la plus vaste encyclopédie des savoirs qu'est l'internet.
Il existe une piste privilégiée de solution à ce danger mortel de
non-acclimatation de toute une nation. Il faut développer l’écosystème des
contenus, méthodes et réseaux, baptisé « e-learning » et construit
autour de l’internet. En ligne, il
est offert à plus d’un million d’étudiants, les cours de Mathématiques,
Physique, Chimie, Biologie, Informatique et Énergie renouvelable. En dehors des
classes, l’internet mobile a également accru l’accès à des bases de
connaissances partagées et aux marchés. Ces derniers, on le sait, sont de moins
en moins limités aux frontières géographiques des États.
Comme c'est le cas dans d'autres pays, une lourde charge financière des
investissements est incontournable pour la RDC, spécialement en matière d'infrastructures,
de logiciels et de développement des contenus pédagogiques. La volonté
politique est la seule capable d'ouvrir ce pays à ce réseau. On peut en espérer
un accès de la jeunesse congolaise aux plus hauts standards internationaux de
l’éducation et à un enseignement de qualité. La recherche scientifique, la
culture et le loisir viendront en sus, telles des cerises sur le gâteau de
l'éducation.
La marche a déjà été entamée ailleurs en Afrique depuis un ou deux
lustres. Par exemple, des solutions approchées comme "e-book"
permettent aujourd’hui à plus de 30.000 familles d’avoir accès à une
"bibliothèque en ligne" de quelque 94.000 ouvrages. Les Kenyans, les
Ougandais, les Tanzaniens et les Rwandais sont déjà actifs sur ce réseau.
D’autres programmes très connus, comme "e-readers",
fournissent du contenu à l'éducation de la jeunesse à travers le territoire du
Kenya. L’Université de Dakar au Sénégal, qui possède une capacité physique de
16.000 étudiants, a pu inscrire environ 75.000 en 2015, soit près de 5 fois
cette capacité physique. Cette prouesse, le Sénégal tout entier la doit à
l'insertion de l'Université de Dakar dans le réseau mondial
"e-learning", en partenariat avec l’Université Virtuelle d’Afrique. À côté d'autres "coopérations
internationales", l'UNESCO est très active dans l'appui aux pays membres
qui le désirent et en expriment la volonté.
Faute d’infrastructures et d’une politique volontariste en la matière,
les solutions techniques proposées en RDC restent sommaires. Elles se limitent
à la gestion des examens et concours, à la publication par SMS des listes des
lauréats diplômés d’Etat, et d'autres menus programmes de fort modestes portée
et envergure. C'est déjà, bien sûr, une avancée appréciable au regard de
l'immobilisme ayant marqué le passé récent. Mais on ne peut que s'inquiéter de
voir le pays en être resté là, depuis 10 ans. La RDC est sans doute capable de
faire plus, à l’image du Kenya aujourd’hui qui, par son "portail national
d’examens", permet aux étudiants de s’enregistrer, de consulter leurs
résultats année après année et de suivre leurs demandes d’accès ou
d’inscriptions aux différentes institutions pour les classes supérieures. Ces
services en ligne offrent beaucoup d’économies de temps et de frais de
déplacement ; ils permettent un bon suivi du cursus scolaire et contiennent la
fraude et la piraterie des pièces scolaires. Le Congo-Kinshasa a tout à gagner
en ce sens.
Au-delà de la construction des bâtiments et des diverses
infrastructures scolaires, les défis appellent l'attention des dirigeants sur
la nécessité de disposer des enseignants qualifiés et régulièrement recyclés à
tous les niveaux, ainsi que des gestionnaires des établissements compétents.
Les NTIC se positionnent dans tous ces besoins comme le meilleur point focal
susceptible de nourrir les connaissances, de consolider les nœuds du parcours
scolaire et de rapproche l’étudiant du monde professionnel où il est appelé à
s'insérer au mieux.
Quelques suggestions pour ce qui est du recours aux NTIC :
1.
Avoir constamment à l'esprit le
déficit en infrastructures qui limite l’accès aux NTIC : l’accès au haut débit
par la fibre optique, l’accès à un réseau fiable et une desserte régulière de
l'énergie électrique, et l’accès à l’enseignement même des NTIC dans le pays.
2.
Concevoir et financer
l’intégration des projets technologiques au moyen des NTIC, avec, parmi les
principaux soucis, celui de transformer l’offre des opportunités d’éducation en
intégrant le pays à un vaste réseau international d'échanges de méthodes,
d'outils et de connaissances. Le temps est révolu où l'on espérait résoudre
localement toute l’équation des défis systémiques.
3.
Le Ministère des PT&NTIC et l'Autorité
de Régulation feraient avancer le pays en réfléchissant à la manière de
baisser sensiblement le coût d’accès à l’internet mobile. L'objectif est de
faciliter un accès massif à la connaissance et à l’information pour la
population jeune, car des connaissances acquises en dehors des salles de classe
améliorent sensiblement la qualité de l’éducation et de la formation dans le
pays.
4.
Les initiatives de localiser des
contenus sur l'internet et dans les réseaux de télécommunications doivent faire
partie des préoccupations des dirigeants. En effet, il n'est pas compréhensible
qu’en RDC, tous les fournisseurs de contenus sur les réseaux de
télécommunications (sonneries, chansons, clips, informations météo etc.), qui
délivrent les contenus locaux, soient autorisés à le faire de l’étranger,
privant le pays de recettes fiscales et de tous effets économiques induits. Dans
ce cas qui ressemble fort à un abandon de souveraineté, il n'est pas possible
de rêver à un marché local. Mais cette lacune n'est en rien irréparable : il
suffirait de motiver ces entreprises, qui vivent tout de même du marché de la
RDC, à s’installer dans le pays et à payer leurs taxes au fisc congolais, comme
cela s'observe sous d’autres cieux africains. L'Autorité de Régulation et le Ministère
des PT&NTIC ont la responsabilité et la mission de veiller à ce que les
textes réglementaires du pays couvrent cet aspect et épargnent au Congo une
perte annuelle des millions de dollars à la faveur d’une énorme évasion
fiscale.
2.3 Santé : rationalisation et inclusivité des systèmes
sanitaires intégrés, grâce aux NTIC
|
Campagne de vaccination en RDC |
Dans le secteur
de la santé, les innovations en matière de NTIC restent très modestes et le peu
de projets lancés ça et là, en Afrique Sub-saharienne, n’ont généralement pas
dépassé les phases pilotes. En effet, la taille modique des crédits alloués à
la santé, ainsi que la faiblesse du cadre juridique sont autant de défis à
relever sur la voie de l'ouverture aux NTIC.
Les enjeux sont
pourtant importants. L'Afrique représente 25% de morbidité et 1% de dépenses de
santé dans le monde, tout en étant peuplée d'à peine 12 à 13% de la population
mondiale. L’Afrique subsaharienne ne possède que 3,5% du personnel médical
mondial et 1,7% des médecins, pour combattre 90% de morbidité causée par la
malaria dans le monde, 67% de cas d’affection VIH dans le monde et le taux le
plus élevé au monde de mortalité infantile. (Cfr WHO Health
Statistics, A survey of Subsaharan Medical School : http://www.human-ressources-health.com/conten/10/1/4). Au mieux, la mise en œuvre des Objectifs du Millénaire (2000-2015) a
atténué ça et là la virulence meurtrière de ces fléaux ; nulle part cependant,
l'objectif visé de les éradiquer n'a été frôlé. Le taux de mortalité sur le
Continent demeure le plus élevé de la planète, surtout pour les enfants. La RDC
ne déroge pas à la règle. Le système sanitaire péniblement tissé sur l'ensemble
du territoire pendant la colonisation (1909-1960) s'est effondré, faute
d'investissements de maintenance, faute de recyclage et de renouvellement du
personnel, et faute d'adaptation des méthodes et techniques à l'évolution
socio-sanitaire. La malaria sévit, comme autrefois. On assiste à un retour en
force des pandémies autrefois éradiquées ou, à tout le moins, sous contrôle
(bilharziose, lèpre, coqueluche, variole, maladie du sommeil, tuberculose,
diphtérie, fièvre jaune, choléra, ...). En même temps, un paquet de nouvelles pandémies fait irruption dans le
pays (VIH-Sida, virus d'Ebola, ...).
Au-delà, de
nouvelles maladies (dites "de civilisation") sévissent : stress,
hypertension, diabète, cancer..., assombrissent l'horizon sanitaire du pays
avec une mortalité dont aucune stratégie ne permet d'entrevoir un moindre
fléchissement d'ici 2040. Certes, entre 2010 et 2015, des crédits budgétaires
ont été votés pour la construction et la réfection des centres de santé
(quelque 80 millions USD en 2014), au bout de 5 décennies d'immobilisme.
Toutefois, les taux de réalisation sur terrain sont demeurés désespérément
faibles (moins de 15%). Le pays est loin de rattraper un demi-siècle de désinvestissement
dans le secteur. En RDC, comme dans la majorité des pays sub-sahariens, le
système sanitaire est − en plus d'être très mal équipé et très pauvre en logistique − déstructuré,
compartimenté et, par conséquent, hautement inefficient. Il fait face à une
demande sociale qui n'arrête pas d'augmenter, de se diversifier et de
nécessiter de nouvelles approches et une cohérence renforcée. Sur fond d'une
mortalité et d'une morbidité à la hausse, les disparités d’accès aux soins de
santé s'accroissent sans cesse entre les milieux ruraux et les centres urbains,
entre les classes sociales, entre les niveaux de revenus et entre les
individus.
Pour affronter
victorieusement tous ces défis, le pays doit faire davantage que des budgets et
du personnel à la hausse : il lui faut repenser et restructurer le système
sanitaire à déployer sur le territoire. C’est face à ce défi systémique que les
NTIC restent les seules à pouvoir apporter une solution appropriée.
L'effort
financier du pays et des partenaires ne peut éviter d'être noyé que dans un
système sanitaire resserré et restructuré : nouvelles méthodes de prévention,
nouvelles approches de prise en charge et d’amélioration de la qualité des
soins. En l'occurrence, les systèmes informatiques destinés à gérer l'accès aux
soins de santé devraient être déployés dans le pays. Une base de données
devrait être conçue en ce sens et installée, à la fois sécurisée et d'accès
facile, au profit des institutions et des professionnels de la santé sur
l'ensemble du territoire national. Des modalités techniques devraient être
aménagées pour son accessibilité également en faveur des patients. Les
techniques en vigueur sont antédiluviennes. Notamment, elles recourent aux
supports de papier ou aux dossiers physiques. Dans chaque formation médicale,
on collecte des données épidémiologiques ou cliniques certes intéressantes,
mais qui sont péniblement archivables et absolument inaccessibles, au-dehors
comme au-dedans de chaque formation médicale. Le pays se présente ainsi comme
une mosaïque de minuscules bases de données inexploitables ; avec une telle
opacité, il ne peut s'inscrire dans une dynamique d'échange d'expériences et de
mise en commun d'approches : recherches médicales et progrès thérapeutiques en
sont d'autant handicapés.
Le recours aux
NTIC rendrait la gestion des données plus rapide, plus efficace et plus
intégrée, capable de couvrir les différents départements et formations médicaux
à la fois, d'indiquer en temps réel les zones géographiques et les étiologies
méritant un appui prioritaire du gouvernement et des autorités sanitaires à
tous les échelons. Ces systèmes informatiques et de télécommunications
fourniraient en tout lieu et à tout moment, à un coût faible et dans un réseau
sécurisé, des données variées sur les patients et les pratiquants, sur la
gestion administrative et financière des centres et formations sanitaires, sur
les besoins en médicaments et en personnel soignant, sur la répartition
géographique des capacités d'accueil, sur la gestion faite ça et là de la
relation avec les patients, sur les besoins et les possibilités de formation et
de recyclage, sur les possibilités de télémédecine, etc. En cette matière, des
programmes et des logiciels sont légion, représentant des possibilités de choix
virtuellement illimitées en relation avec les besoins à couvrir.
L’outil Internet
reste une technologie fédératrice dans la collecte, le traitement et le partage
en ligne des données d’information et d’éducation sanitaires, ainsi que dans la
gestion des relations patients-pratiquants. En particulier, les
télécommunications mobiles peuvent permettre de réduire la fracture numérique
entre les zones de santé rurales qui couvrent (théoriquement) plus de 70% de la
population, d'une part et, d'autre part, les systèmes sanitaires urbains.
Aucune approche
de gestion des soins de santé ne peut de nos jours se prévaloir d'être plus
efficace sans le concours des NTIC. En effet, toutes les stratégies à mettre en
place à tous les échelons devraient intégrer des challenges et des considérations
suivantes :
1.
Développer les cadres légaux et
les politiques de promotion des standards nationaux. En effet, vu la
sensibilité du secteur de la santé, il est conseillé de mettre en place une
supervision réglementaire des protocoles cliniques et de la gestion des
fichiers électroniques pour la meilleure protection des données.
2.
Mettre en place un corps
centralisé de coordination dans le traitement et le partage de données afin
d’éviter des effets de bords tel que la multiplication inutile des investissements
qui entraîne très souvent la duplication des applications. De façon plus
pratique, il convient d'installer un centre informatique de données de santé de
la république, qui soit accessible à distance pour tous les corps de santé et
les administrations sanitaires (cet accès doit être réglementé et sécurisé).
3.
Au nom de la prévention, de
l'efficacité opérationnelle et des économies financières à réaliser, organiser,
autour du concept "e-santé", tout un système intégré de gestion, de
supervision et de coordination des institutions et des soins de santé sur
l'ensemble du pays.
Bien entendu, les données relevant de la santé sont très consommatrices
de bandes passantes. Pour peu qu'on veuille accéder à l’information à travers
un si vaste pays, il est impératif de stocker des masses de données sur un
serveur distant (ou un Cloud), de
développer les infrastructures télécoms à larges bandes passantes, comme des
dorsales et des boucles locales en fibre optique.
De tous points de vue, les avantages sont évidents, avec un système de
santé maîtrisé et modernisé dans ses principaux compartiments : surcoûts et
dédoublements sensiblement réduits, qualité améliorée des soins de santé, accès
facilité aux soins avec, en prime, une forte réduction de la fracture entre villes
et campagnes autant qu'entre individus et entre catégories sociales, une
population davantage soustraite aux chaînes de la débilité et de la mortalité,
... Autant d'avancées susceptibles de consolider la bonne santé des habitants
et de l'économie du pays.
2.4 PME : Ouvrir un boulevard à la croissance et édifier une base
économique forte, grâce aux NTIC
|
Une entreprise de transformation
du bois en RDC |
Selon les estimations et recoupements de l’INSS et des services du Registre du commerce, qui travaillent
sur le terrain, l’ensemble des PME actives en RDC de moins de 50 personnes (entités unipersonnelles incluses) pourrait
représenter une population de plus de 3,5 millions, dont seulement 50 000
sont enregistrés au Registres du commerce.
Sur Kinshasa, une personne sur dix détient une activité commerciale, déclarée
ou non déclarée. Ces chiffres démontrent clairement la taille de l’écosystème
et les défis à y relever.
De manière assez générale, les PME rencontrent des difficultés assez
sérieuses dans l’accès au crédit, et paient au quotidien le prix de travailler
dans un environnement hostile. L’Etat est perçu par les entrepreneurs comme le
premier ennemi des affaires : insécurité juridique, tracasseries
administratives, insécurité fiscale chronique, politiques monétaire, financière
et budgétaire incohérentes, faiblesse du système judiciaire, risques liés à une
régulation politique perçue comme chaotique...
Les taux d’intérêt des crédits bancaires sont en moyenne largement
au-delà de 12% l'an, en RDC. Les microcrédits font davantage dans l'usure. Les
garanties bancaires sont inabordables. Les PME n'ont guère accès aux ressources
financières. La situation est même sans issue pour la classe moyenne d'affaires
nationale. Des firmes étrangères et certaines entreprises d’Etat ont coutume de
se faire financer leur trésorerie sur leur dos et de fort curieuse manière.
Elles contraignent les PME clientes à préfinancer leurs commandes des semaines
voire des mois à l'avance ; de même, elles retardent des semaines voire de mois
le remboursement de leurs dettes commerciales envers celles-ci. Ceci tue en
silence, chaque année, des centaines de PME congolaises, qui par ailleurs ont
du mal à avoir accès aux appels d’offres des multinationales installées en RDC.
En ce domaine, les pays africains qui seraient mieux lotis sont rares
(RSA et pays du Maghreb). En effet, au Kenya et au Nigeria, il est exigé,
"pour sécuriser le crédit", une garantie représentant en moyenne 160%
du montant.
Les NTIC apportent des solutions qui peuvent soulager les PME. Entre
autres facilités, il leur est donné la possibilité de renforcer leur capacité
commerciale et les outils pour gérer leur clientèle. Leurs produits peuvent
être exposés sur la toile, leur compétitivité dévoilée. Certes, ce fait ne
garantit pas à lui seul la présence d’acheteurs solvables. Il est créé une
« place de marché » permanente, où l'offre et la demande sont dans un
face-à-face synchrone et de tous les instants, soustrait aux intempéries et à
l'inattention. Le site web nigérian
"Get Nigerian Business on Line"
(GNBO) est un exemple à suivre. C’est un portail de commerce électronique, une
« place de marché », unique et permanente, qui permet aux PME nigérianes
d’exposer à toute la planète leurs marchandises en ligne, sans multiplier des sites webs privés cloisonnés. Cette
initiative a permis à certaines PME de multiplier par 10 leur chiffre
d’affaires. C’est réellement une galerie Internet
qui, d'entrée de jeu, offre à chaque marchand une intéressante fenêtre
d'opportunité et un espace dans un vaste carrefour commercial.
Cette idée a été suivie en Côte d’Ivoire autour du marché central
d’Abidjan. En effet, le portail ivoirien « abidjandeal.com » de commerce électronique permet maintenant à
tous les ivoiriens d’avoir, sur Internet,
accès aux étalages du marché central d’Abidjan et de profiter des prix plus
avantageux que ceux affichés par des boutiques du centre-ville. Ce site web permet aux clients de commander
un article chez le commerçant et de passer après le récupérer. Pour certains
commerçants ivoiriens, les ventes en ligne dépassent déjà 10% de leurs recettes
mensuelles. Les initiatives de ce genre se multiplient dans d'autres pays
africains, mieux desservis en courant électrique de bonne qualité, et mieux
équipés que la RDC dans les infrastructures haut-débit
de télécommunications. Il est offert à tous les citoyens un accès facile, et à
un coût raisonnable, à une « place de marché » large, permanente et achalandée.
Toutefois, dans les pays d’Afrique Sub-saharienne qui ont pu relever le
défi des infrastructures, le commerce électronique rencontre encore certaines
résistances. En première ligne mentionnons, le manque de confiance dans le
"paiement en ligne", de même que la faiblesse des services de
livraison à domicile, pas toujours aidés par des adresses approximatives. Pour
palier à cela, certains sites marchands des pays africains ont décidé
d’accepter les commandes par courrier électronique (MMS, SMS, e-mail) et de
délivrer eux-mêmes les produits chez le client, moyennant un paiement cash sur le pas de la porte. Ce qui est
très réaliste, comme début. On voit ce genre de pratique sur les sites comme
« Kooking.com » au Ghana, qui livre sur commande de petits déjeuners
à domicile. A Kinshasa le site emar.cd qui vous livre les légumes a domicile
sur le même modèle.
Plusieurs PME africaines ont compris que la toile est une plateforme de publicité puissante. À leurs canaux
traditionnels de publicité, elles ajoutent une boutique virtuelle sur un site web
: elles réussissent ainsi à multiplier des visites sur leurs catalogues, à
gonfler leurs ventes et à accélérer la rotation de leurs stocks. De telles
avancées commerciales ne sont pas négligeables pour l'Afrique : en effet, avec
12 à 13% de la population mondiale, le Continent ne représente à ce jour que 2
à 3% des échanges commerciaux sur la planète !
Les NTIC permettent également aux PME d’accroitre leur efficacité dans
la gestion de leur chaîne logistique.
Les PME recourent au Web pour des
informations concernant les différents maillons de leur chaîne
d’approvisionnement. Mieux informées, elles ont le loisir d'écourter cette
chaîne de mille manières, et de diminuer ainsi leurs charges
d'approvisionnement. Dans ce cadre précis, l’Inde a développé des "Clouds d’applications et services"
dédiés aux PME. Pour baisser leurs charges, celles-ci regroupent leurs
commandes et leurs ressources : l'accès aux maillons "meilleur
marché" de leur chaîne d'approvisionnement est désormais possible. Bien
plus, des commandes groupées de plusieurs PME fait bénéficier à chaque PME d'un
discount important sur le coût d'achat unitaire des biens commandés. De leur
côté, les fournisseurs tirent profit de grosses commandes, en échappant aux
frais de dépôt et en accélérant la rotation des stocks et, du même coup, le
rythme de production. L'État indien semble avoir compris les innombrables
avantages économiques, fiscaux et sociaux que le trésor public et le pays
pouvaient tirer d'un tel dispositif. Il n'a pas reculé devant le coût des
infrastructures de transports et de télécommunications.
À l'opposé, comment ne pas penser à la manière dont la RDC a fait
perdre tous leurs marchés aux petits exploitants ruraux, et sacrifier ainsi
l'économie et le bien-être de tous les milieux ruraux ? Dès juillet 1960
jusqu'à 1976, tout ou presque a été détruit sur l'ensemble de l'immense
territoire national : routes, ponts, matériels et véhicules de transports,
dépôts de transit et équipements de conditionnement de produits agricoles,
animaux et halieutiques, réseaux de commercialisation, places et installations
de marché dans le monde rural, pouvoir d'achat des consommateurs urbains ...
Tout a été perdu, jusques-et-y-compris le souvenir des relations commerciales
étroites ayant existé pendant des décennies entre les villes et les campagnes
du pays, et même entre différentes localités rurales. Tant et si bien qu'à ce
jour, le monde rural, ainsi isolé et appauvri au plan commercial, vit replié − chaque
localité pour soi − sur une très modeste production de subsistance. Au bout des 57
dernières années, le bilan socio-économique est effarent : les 40% de la
population urbaine, soit environ 32 millions d'habitants vivant dans une
quinzaine de centres urbains, consomment à 85% des produits agricoles, animaux
et halieutiques importés, généralement sans garantie sérieuse de qualité. En ce
jour précisément, il vient d'être interdit la consommation en RDC des tilapias
surgelés en provenance de la Colombie, du Pérou, de l'Égypte et de la
Thaïlande. La semaine passée, les œufs importés des Pays-Bas, et refusés à la
consommation dans toute l'Europe, n'ont eu droit à aucune espèce de méfiance en
RDC...
La pénétration rapide de l’Internet
dans un pays est donc un puissant levier, autant pour la santé de la
consommation que pour le développement de la production nationale. Elle fait
circuler l'information au moindre coût, plus rapidement et plus sûrement. Elle
libère et multiplie les initiatives créatrices. Elle multiplie et densifie les
échanges sociaux, culturels et économiques. Elle renforce le maillage entre les
différents secteurs d'activité et entre les différentes régions du pays. Elle
gonfle, intègre et renforce le marché national que, par ailleurs, elle ouvre
avantageusement sur les échanges extérieurs.
Avec les NTIC, il devient donc impératif, pour les pays qui veulent
dynamiser leur marché national, de combiner l’incitation à l’entrepreneuriat et
le développement d’un écosystème d’expertise technique locale. Cet écosystème
est capable d’apporter constamment d'inestimables solutions informatiques et
télécoms aux innombrables goulots d'étranglement qui étouffent nos économies,
chaque jour qui passe.
En Afrique Subsaharienne, les pays anglophones ont mieux compris et
saisi les opportunités qu’offrent les NTIC. Toutefois, des difficultés
persistent encore. Elles se manifestent notamment dans la construction et la
maîtrise des fermes d’incubation au
service des start-up (ou
entrepreneurs débutants) locaux, capables à leur tour de pérenniser de façon
créative un tel écosystème, et aptes à passer à la génération suivante le relai
de la flamme d'innovation. Les moyens et les efforts affectés à cette
durabilité (sustainability) sont
encore trop faibles, sans doute parce qu'ils sont encore perçue par les
dirigeants comme une dépense improductive et non comme un précieux
investissement.
Le défi de créer une classe
moyenne d'affaires nombreuse et dynamique procède d'une nécessité
incontournable. Malheureusement, la plupart des dirigeants africains ont leurs
soucis et leurs regards ailleurs. C'est comme si le Continent se préparait à
célébrer en 2021, au titre de nouvelle "décennie perdue pour le développement", les années 2011-2020.
Les discours volontaristes d'aujourd'hui ne changeront rien à la déception
collective que l'absence d'engagement sur le terrain prépare en cette décennie.
Et pourtant, les NTIC sont un puissant levier pour installer, simplifier et
huiler les rouages de l'innovation et des investissements locaux. Elles peuvent
accélérer la croissance économique par l’accumulation des richesses sur une
base élargie et rationnalisée de l'entrepreneuriat local. Dans une telle
perspective, les recommandations suivantes seraient fort utiles aux dirigeants
africains :
1.
Les dirigeants doivent encourager − réellement en actes et plus
seulement en paroles ! − le secteur privé autochtone, le commerce électronique et
les paiements en ligne.
Pour relever ce défi (plus socioculturel que technique et financier !),
les dirigeants doivent créer un environnement particulièrement favorable à
l’innovation, indispensable dans l'élaboration des différents business modèles qui accompagnent le
commerce électronique. En RDC, il va falloir aller bien au-delà du
« Mobile Money » qui s'installe si tardivement et péniblement, mais
non sans succès : créer des "Centres NTIC d’excellence" en connexion
avec des "Incubateurs de PME" (à disséminer sur le territoire
national et à rendre accessibles aux Congolais !). C'est cela l’écosystème
idéal dont il vient d'être signalé l'initiative − et les limites − en Côté
d'Ivoire et dans quelques pays anglophones du continent.
Le concept de parc technologique,
à l’image du parc agricole, doit être
absolument promu pour faire accéder rapidement le pays aux nouveaux modèles
économiques rencontrés sur la toile.
Il n'est pas justifié de subir de l'extérieur la révolution numérique, en laissant persister l’inertie actuelle dans
le domaine des NTIC. Par les NTIC, les contenus économiques des nations
s'édifient dans la diversité, en quantité et en qualité. Dès lors, dans la
sécurité pour tous, les frontières des États s'effacent, de même que les
cloisons sociales et les écarts temporels : rythmes et émotions sont partagés
en temps réels sur toute la planète, grâce à ces "autoroutes de
l'information". Techniquement, on peut
aujourd'hui, à partir de n'importe quel coin du globe, et en étant assis dans
son fauteuil, commander n'importe quel bien dans n'importe quel autre coin de
la planète. Malheureusement, cette possibilité technique est aujourd'hui
limitée aux nations qui ont, par delà l'électricité en permanence et pour tous,
un maillage dense et fiable d'infrastructures modernes de télécommunications,
et une volonté politique inébranlable d'affronter les défis de la révolution numérique.
Il est indiscutable que, pour réussir un tel tournant, le rôle du privé
local est aussi éminent qu'il est irremplaçable. Mais il est encore plus
évident que la responsabilité incombe aux seuls États en matière de choix
technologiques, d'orientation, d'impulsion, de motivation et d'encadrement des
initiatives privées. Abandonner
toute cette responsabilité entre les mains des privés − et exclusivement
entre les mains des firmes privées étrangères ! − est tout, sauf une
garantie de survie collective dans ce monde impitoyable en continuelle
globalisation. C’est malheureusement le cas en ce moment en RDC.
2.
Les dirigeants doivent impérativement,
s'ils veulent très vite s’accrocher au train des nouveaux modèles économiques
performants, promouvoir, à des coûts très abordables, des Clouds au service des PME locales, ainsi que des connexions internet de type "large
bande" et de bonne qualité.
Une telle stratégie implique le développement de "parcs
technologiques". Un "parc technologique" est conçu et fonctionne
comme un guichet unique pour l'ensemble de services aux secteurs et aux agents
économiques du pays. Il a mission d'offrir à l'appareil productif du pays
l'espace d'innovation le plus large et le plus intégré, c'est-à-dire une
plateforme technique pourvoyant aux besoins d'information, de formation,
d'approvisionnement, de choix technologiques, d'équipements, de débouché, de
promotion, de compétitivité, de cohérence et rationalisation, de
non-duplication des investissements et de non-dispersion des initiatives, etc.
À l'intérieur des frontières des États, ces besoins sont ceux des
entrepreneurs privés. Mais, tout autant, ils sont des préoccupations des
gouvernements de la planète. Les dirigeants clairvoyants concentrent les NTIC
sur un même endroit, en un, deux ou trois "parcs technologiques", à
la manière dont, par exemple, le gouvernement des États-Unis a créé le Silicon Valley. Ou à la façon dont le
gouvernement des Émirats Arabes Unis a créé dans la ville-capitale Dubaï, sous
la forme d'un guichet unique des services aux entreprises et aux citoyens, le
"parc technologique" dénommé "Internet City".
3.
L’Etat doit également créer des
incitations fiscales et douanières, ou octroyer des subventions directes sur la
base des critères impersonnels aux grands opérateurs nationaux, publics et/ou privés. Ce ne peut être conçu comme un
geste de générosité du prince ; mais plutôt comme une réponse rationnelle à une
nécessité vitale : celle de faire fléchir les tarifs d’accès à l’Internet pour renforcer la compétitivité
de l'économie du pays.
La voie, qu'a choisie la RDC, de multiplier des opérateurs privés
étrangers dans le secteur de télécommunications, est, à très court terme,
certes fiscalement payante et pourvoyeuse d'avantages individuels pour les
décideurs (pas de porte, bradage de fréquences, dessous-de-table). Mais, à
moyen et long termes, une telle voie est économiquement suicidaire, pour le
pays. En effet, l'octroi de fréquences, de ressources et de facilités à un seul
consortium de quelques opérateurs −
à un noyau dur d'entreprises triées sur le volet et ayant un cahier de charges
−, est la seule voie qui soit prometteuse d'économies
d’échelles et pourvoyeuse d'externalités positives. Partout, la baisse générale
de coûts et tarifs d’accès à l’Internet
a été à ce prix. On n'en est pas là en RDC. À vrai dire, aucune option
cohérente ne semble émerger des décisions du gouvernement de la RDC, dans ce
domaine où l'attentisme, l'indécision et l'incohérence arrangent parfaitement
le portefeuille des décideurs individuels, mais tue l'intérêt général et bloque
l'avenir. Le pays n'a pas d'autre choix que d'espérer un miracle !
4.
Dans son interaction avec les
habitants, il est hautement souhaitable que le gouvernement lui-même prêche par
l'exemple en recourant aux facilités qu'offrent les NTIC : informatiser l'état
civil, la surveillance du territoire, le rôle fiscal et douanier, les services
judiciaires, la police et les renseignements généraux, le recensement de la
population et de l'habitat etc. En effet, une marche résolue vers l’e-government (ou la numérisation de la
gestion publique) serait une irremplaçable incitation, agissant comme un
électrochoc, pour changer les mentalités et les pratiques dans le pays. La
création d’une Agence Informatique de
l’Etat serait un premier pas vers l’informatisation des services publics.
Certes, cela tombe sous le sens (républicain). Mais une immense montagne de
pesanteurs est érigée par des lobbys intérieurs et extérieurs qu'enrichit
l'opacité dans la gouvernance du pays.
5.
Les quatre recommandations
ci-dessus s’intègrent dans un projet unique : celui de "parc
technologique". Cette plateforme technique hébergerait en « mode
Cloud » et mettrait en interface tous les centres − privés et publics − de production et de consommation de données
d'information : les données et les applications en ligne seraient accessibles
presque toujours en temps réel, à très faible coût et avec des charges
financières abordables pour l'implémentation. En RDC, cela n'irait pas sans
d'imposants préalables : une desserte permanente et de qualité en énergie que
le pays n'a pas, des infrastructures de télécommunication à haut débit et aux
coûts abordables pour accès général à tous les centres de données hébergés par
le "parc technologique". En somme, il s'agit de rapprocher les
plateformes du Gouvernement à ceux du secteur privé. Il peut résulter d'une
telle masse critique un centre
d’excellence qui, grâce à des synergies en tous sens, conduirait à une économie
numérique dynamique.
Seule la volonté politique
de l’Etat peut hisser le Congo sur cette orbite, où gravitent déjà une majorité
chaque jour plus large des nations modernes.
Une voie large serait ainsi
ouverte à l'édification d'une base économique intérieure forte, essentiellement
par le dynamisme des PME et PMI à capitaux propres.
2.6 Finances et monnaie : cohérence, inclusivité et
solidité du système de gestion, grâce aux NTIC.
|
Le Ministère des Finances en RDC |
En une dizaine d’années, la RDC a connu une véritable ruée de banques
commerciales. En 2005 elle ne comptait moins de 8 banques et, en 2017, elle en
compte 22. C’est réellement un record, généralement présenté comme une retombée
positive d'une "longue période de paix" et de "croissance
soutenue de l’économie". À maints égards, une telle explication est un peu
forcée (mais il s'agit-là d'une tout autre question). Le premier distributeur automatique de billets
(DAB) et le premier terminal de paiement
à carte (TPC) a été installé à Kinshasa en 2006 par la Rawbank, pionnière
en la matière. La RDC détient aujourd’hui un parc de 700 DAB et environ 3.000
terminaux de paiement. Comparativement, l’Afrique du Sud détient 23.000 DAB
dont 3.000 dans la seule ville de Johannesburg.
Par contre, la Banque Centrale du
Congo n’est pas encore équipée d’une plateforme interbancaire automatisée
de transfert d’argent pour les gros montants (RTGS : Real Time Global Settlement). La RDC est le seul pays de la SADC
non encore équipé en la matière. Les transferts son quasi manuels et le temps
d’exécution est trop long. Avec près de 10 ans de retard, elle vient à peine de
s’engager en février 2016 dans la mise en place de cette plateforme. C'est avec
le numéro 1 mondial en la matière (la société américaine Montran) qu'elle vient de signer un protocole en ce sens. Mais
c'est à l'horizon de mi-2018 que ce projet pourrait aboutir.
Les banques privées quant à elles n’ont pas encore un switch électronique de transfert d’argent
pour de petits montants (EFT : Electronic
Funds Transfert). Seules les 4 premières banques de la RDC, en manque de
solution depuis des années (comme ce fut le cas en Afrique du Sud il y a des
dizaines d'années), viennent de se mettre ensemble pour lancer un switch monétique commun. Comme son nom
le dit, c'est essentiellement dans la monétique. Cette facilité technique est
destinée à offrir aux habitants de Kinshasa (et peut-être bientôt de
Lubumbashi) un parc de près de 400 distributeurs interconnectés, payant en CDF,
USD et Euros, sur présentation des cartes bancaires émises par les 4 banques.
Autrement dit, chaque DAB de n'importe laquelle des 4 banques servira
indifféremment tous les clients des ces 4 banques, porteurs d'une carte
bancaire valide. Les autres banques sont apparemment sous-équipées en monétique
; elles hésitent à se joindre aux premières. Quant à la Banque Centrale du Congo, elle ne surprendrait personne si elle
bloquait cette initiative privée : la loi lui attribue le monopole opérationnel
en la matière ? Dans les milieux financiers privés, principalement extérieurs,
il serait souhaitable de voir la BCC encadrer cette initiative et de
l’encourager, en mettant en place une régulation comme elle sait si bien le
faire.
On comprend l’impact des NTIC dans les finances. La mise en place de
plateformes interbancaires automatisées est une de leurs applications
élémentaires et courantes. Elle accélère la circulation monétaire et a, par
conséquent, un impact sur le niveau général de la liquidité et des prix. Une
formule simple pour calculer la taille du marché intérieur : celle-ci peut
être grossièrement estimée en multipliant la masse monétaire à la vitesse de
circulation de la monnaie. En d’autres termes, l’accélération de la vitesse des
transferts monétaires peut être un levier pour la croissance : les échanges
commerciaux n'en seraient que facilités, notamment pour les secteurs productifs
ruraux à ce jour déprimés et repliés sur la subsistance. Malheureusement, en
RDC, ces flux irriguent quasi-exclusivement les secteurs de la finance,
d'extractions-exportations et de spéculation foncière, presque totalement entre
les mains des opérateurs étrangers. Le Congo profond, vivant sur un espace
économique infiniment fragmenté, en est exclu et végète dans l'immobilisme.
Mettre en complémentarité et en réseau sur la toile les établissements
bancaires et les institutions financières de microcrédits, paraît offrir un
exutoire à la marginalisation qui tétanise le Congo des petits producteurs
ruraux. Depuis les années 1990, les banques se sont globalement retirées de ces
milieux chaque jour plus pauvres. Des établissements de microcrédits les y
remplacent péniblement, avec des pratiques d'usure qu'aucune loi ne décourage.
La création sur la toile d'un réseau
des institutions financières et bancaires est susceptible d'offrir, de manière
inclusive, à tous les secteurs d'activité et à tous les milieux sociaux,
l'opportunité de se brancher sur les flux de liquidité et, par delà, sur le
flux des biens et services. Une telle plateforme sur la toile regrouperait des
centres de services financiers mutualisés. Fonctionnant avec un coût faible
d’accès, elle déboucherait sur : (i) l'abandon des DAB exclusifs à chaque
banque dans le seul milieu urbain, (ii) l'émission des cartes locales, à la
diligence de n'importe quelle institution financière/bancaire, cartes utilisables
par tous leurs détenteurs dans tous les DAB sur le territoire indistinctement,
(iii) abandon des terminaux de paiements exclusifs à une banque, un seul
terminal dans n'importe quel coin pourra centraliser tous les paiements des
institutions bancaires et de microcrédits.
Pour y arriver, les opérateurs de Télécoms et les banques se mettent
d’accord au-delà des transferts et des paiements. Ils doivent aboutir, grâce à
une plateforme, à une gamme plus variée de services financiers favorisant
l’inclusion financière. Dans son rôle de régulateur, la BCC se doit de
faciliter cette évolution par des mesures incitatives appropriées. Il lui faut
notamment abandonner des préoccupations bassement "fiscales" à
rentabilité immédiate, et revoir ses coûts interbancaires à la baisse, en
misant à moyen et long termes sur l'augmentation du volume des transactions.
Cela ne pourra qu’accélérer le développement de l’e-commerce et des transactions en ligne. Les exemples au Ghana et
au Kenya sont nombreux sur la promotion d’une gamme complète de services
financiers sur la toile comme les
assurances, les crédits et l’épargne concernant les particuliers et les
entreprises. Par ailleurs, le développement des plateformes comme Pesapal et Pagatech
montre à suffisance que l’utilisation de l’argent dans le mobile pourrait aider à l’émergence de l’e-commerce par un accès à une frange plus large de la population.
En Afrique sub-saharienne en 2012, on comptait 57 millions de comptes actifs
sur les plateformes de d‘argent mobile,
soit le double du volume de connexion sur Facebook à la même période. La
combinaison argent mobile et l'internet est une passerelle de
développement essentielle vers le e-commerce.
Concrètement, à partir de n'importe quel coin du pays, les habitants seront capables
d’acheter en ligne sur l'internet, en
payant par Airtel Money, Mpesa, Orange Money ou Tigo Money,
etc. Pourvu, évidemment, que l'électricité suive !
Pour que le Gouvernement congolais puisse profiter au maximum de ces
opportunités, les orientations stratégiques sont appelées à s’appesantir sur
les points suivants :
1.
« Le Mobile Money » ou
l’argent sur le mobile est une opportunité que le Gouvernement doit encourager
en créant un cadre légal propice à son décollage effectif et inciter les
banques à également s’engager sur ce type de plateformes en intégrant « le
Mobile Money » aux transactions électroniques e-commerce sur l'internet.
Seuls, les opérateurs privés ne peuvent y arriver. Il va falloir un coup de
pouce décisif du gouvernement et de la BCC.
2.
Le KYC (le système
d’identification standard des clients dans les banques) doit être promu par le
gouvernement, en équipant et en poussant les services administratifs d'état
civil à numériser l'identification des habitants. Les entreprises auront ainsi
un référentiel unique pour un accès sécurisé à leurs biens et services, avec
tous les avantages de traçabilité.
3.
Des efforts à différents niveaux,
public et privé, doivent être mis sur l’accès au réseau mobile et à l'internet,
de la meilleure façon et à un coût faible, au profit de la plus grande partie
de la population.
La BCC doit s’inscrire dans l'esprit et l'effort d'un tel changement. À
défaut, le pays souffrira encore plus longtemps de l'étouffement des
initiatives créatrices des banques en matière monétique. Le rôle de régulation
qui lui est dévolu doit prendre toute sa dimension créatrice de nouvelles
approches informatisées qui favorise l'intégration économique, financière et
monétaire, avec, en perspective, un espoir d'extension du marché intérieur, de
diversification de la production et de la compétitivité améliorée des produits
congolais.
2.6 Gouvernance : cohérence, traçabilité, efficacité
et redevabilité républicaine, grâce aux NTIC.
|
Les briques de la Gouvernance |
Quand on jette un coup d'œil aux indicateurs publiées par la Banque mondiale
sur la Gouvernance (responsabilité, stabilité, efficacité, et qualité de la
régulation des institutions, lois, contrôle de la corruption, etc.), les notes
reçues par la RDC ne sont absolument pas flatteuses, loin s'en faut. La RDC
fait partie des pays les opaques et inefficaces au plan de la
"gouvernance", que ce soit dans le classement des pays sur le
Continent, que ce soit au classement général des nations sur la planète.
Du seul fait d'avoir perdu sa desserte régulière et fiable en énergie
électrique, la RDC est retournée à la phase de balbutiements dans
l’informatisation, après avoir été, au début des années 70, l’un des pays les
plus informatisés en Afrique. Une Agence
de l’informatique de l’Etat était rattachée à la Présidence de la
République sous la dénomination de SPIZ (Services
Présidentiels de l’Informatique au Zaïre), une agence qui fut dissoute vers
la fin du régime Mobutu. La conséquence néfaste de cette regrettable
suppression se fait cruellement sentir aujourd’hui. En effet, l’informatisation
de la chaîne de recettes est devenue parcellaire, autant que celle de la chaîne
de dépenses de l’Etat congolais. Les finances publiques du pays n'ont guère de
transparence : détournements, corruption et concussion prospèrent dans les
méandres de ces multiples zones d'ombre taillées dans ce circuit financier. Un
PIB infime de quelque 32 milliards de $ US courants, et un budget famélique de
quelque modestes 8 ou 9 milliards, sont donc compréhensibles, de par la
non-transparence des circuits financiers et de par d'immenses détournements que
celle-ci facilite. Des efforts immenses
sont à fournir pour intégrer ces services dans la transparence et pour créer
une interface fiable entre les institutions financières de l’Etat congolais :
les NTIC sont l'unique solution, avec le réseau internet connu ailleurs sous la
dénomination anglo-saxonne de "e-government".
Sur le chemin d'une telle solution, les défis sont une montagne en RDC.
Certes, des bonnes volontés existent au gouvernement et dans d'autres institutions
publiques en faveur de l'informatisation intégrale de la gestion de l'État
congolais. Mais la résistance au changement est remarquable à tous les niveaux
; il existe une opposition sourde à tous les projets structurants, susceptibles
de "rationaliser" les dépenses publiques et surtout de briser l'élan
de détournements, de fraudes et d'évasions fiscales, phénomène pudiquement
baptisé « coulage de recettes » en RDC. En l'absence d’un cadre de cohérence de la
gouvernance, les bailleurs de fonds empirent le mal à l'échelle du pays :
spécialement, ils multiplient des projets sectoriels d’informatisation en
dehors d'une ligne directrice d’intégration nationale pourtant à portée de main
grâce aux NTIC.
Aucune approche de partage de ressources et d'informations n’est
envisagée en RDC, dans un sens favorable à la mise en place d’une centrale de
données de gestion. Toutes les institutions opèrent en monades parfaites,
chacune selon d'immenses besoins privés de sa hiérarchie et selon un minimum de
ses besoins de fonctionnement. Aucune visibilité n'est garantie pour la
plateforme gouvernementale, cette institution qui est en charge de la
gouvernance globale du pays. Bref, il semble n'exister aucune vision ou
stratégie d’intégration de l’appareil de l’Etat, grâce aux NTIC, dans un
système informatique intégré, capable d’offrir au public des guichets uniques
d’enregistrement ou de paiement. Au stade actuel, aucun indice n'autorise à
rêver de création d'une plateforme informatique "e-government" pour le Congo, dans un futur proche.
Mais rien n’est encore perdu. "Il
n'y a, dit un adage, pas de situation
désespérée ; il n'y a que des peuples qui désespèrent". L’évolution
des NTIC permet encore des solutions techniques adaptées, mais moyennant une
puissante − et subite − impulsion volontariste de la part des dirigeants politiques du pays.
Les Congolais ont, sous leurs yeux et dans leurs oreilles, des indicateurs qui
ne trompent pas sur leur misère collective : les notes annuelles attribuées au
pays par Doing Business, les divers
classements statistiques annuels du PNUD, de la Banque mondiale ou de l'OMS,
les multiples appréciations individuelles des experts économistes et financiers
de tous bords,... confortent leur ressenti habituel peu rassurant quant à leur
destin collectif. Les NTIC demeurent le principal portail technique qui
n’attend qu’à être ouvert par les dirigeants, mais à une triple condition au
niveau de ceux-ci : le vouloir réellement, lever la pesante hypothèque des
lobbys conservateurs qui parasitent les institutions du pays et en détournent
les ressources, et, enfin, de mobiliser des efforts humains et des moyens
conséquents.
Certains pays d’Afrique noire ont, plus que d’autres, eu des politiques
agressives dans la promotion des NTIC. Cette audace a porté ses fruits,
notamment en améliorant sensiblement la productivité du travail dans le pays,
en confortant la compétitivité de la production nationale, en relevant
l’efficience et la gouvernance dans les différents appareils de l’Etat, et en
clarifiant et en rendant plus confiante la relation entre les institutions de
l’Etat et les citoyens. Le Kenya, juste aux frontières de la RDC, est l’exemple
parmi les plus lumineux en Afrique où les pays en pointe se comptent par
dizaines. Tous les ministères au Kenya
ont une présence sur la toile, autour
d’une plateforme unique "Kenya e-gouvernement".
En effet, la mise sur pied de cette infrastructure a simplifié l’accès à
l’information des Kenyans, la réactivité et la coordination des services de
l’Etat par l’instauration de guichets uniques d’enregistrement et de demandes
de formulaires, une gouvernance cohérente comme un seul rouage où tout grain de
sable qui s'y glisse est virtuellement identifié et extirpé. Au Kenya, beaucoup
d’initiatives ont vu le jour dans l’automatisation de la gestion de
l’information qui a participé à baisser considérablement les coûts de gestion
administrative et a accru l’efficacité de l’administration publique. D’autres
pays comme le Sénégal et le Nigeria ont mis en ligne leurs constitutions, textes
de loi et toutes les procédures administratives. Ce qui a rendu transparentes
aux citoyens les formalités administratives : toutes les modifications de lois
ou les touches apportées aux procédures sont intégrées en temps réel. Un gain de temps absolu a augmenté de manière
substantielle le nombre d’utilisateurs dans ces pays. Plus encore, au Sénégal il a été mis en place
une plateforme sur la toile dénommée GAINDE
2000, où importateurs et exportateurs paient leurs frais douaniers à tout
instant, sans bouger de chez eux et sans faire une moindre file devant un
guichet : gains de temps et d'argent pour tous, administratifs et contribuables
; paperasses et "coulage de recettes" douanières conjurés ;
transparence garantie pour l'État sénégalais sur sa chaîne de recettes ; et
même, dans certains cas, prix à la baisse des biens importés, et recettes à la
hausse des biens exportés. Les exemples de ces « success stories » en matière de NTIC sont de plus en plus
nombreux en Afrique sub-saharienne, souvent aux frontières mêmes de la RDC !
Où elles ont réussi, toutes ces innovations de l'économie numérique ont été considérées comme un investissement productif et non comme un
coût, ni pire encore comme un cadeau généreux du prince à son peuple. La preuve
est faite partout : elles ont permis de réduire sensiblement le temps
opérationnel en toutes choses, de minimiser les charges financières des privés
et des administrations dans la gestion de dossiers, de diminuer les doubles
emplois, les détournements, les fraudes et évasions fiscales ainsi les ponctions illicites liées
à l'exercice d'une moindre parcelle de pouvoir. Deviennent ainsi la règle
sociale de la gouvernance du pays la traçabilité de tout flux, l’efficacité
économique et sociale de toute décision de gestion de la part du gouvernement,
et, last but not least, une confiance renforcée des citoyens dans les
institutions qui les gouvernent. Il est impératif que la RDC, à l’image du
Kenya, ou du Sénégal ou ..., puisse faire ressusciter de ses cendres et la
remettre au diapason sa défunte Autorité
Informatique Nationale, un « ICT Board » congolais, pour en faire
une des têtes pensantes de l'édification nationale.
Pour réussir le pari de l’intégration des NTIC dans la gouvernance du
pays, les dirigeants congolais, quel que soit le côté où loge le cœur dans leur
poitrine, se doivent de suivre la ligne directrice suivante :
1.
Désigner à tout prix − et
rapidement − une autorité unique et compétente chargée de mener des études
appropriées et de conseiller une vision, des stratégies et des initiatives
d’informatisation de l’Etat. Aucun Etat au monde, dans les pays en voir de
développement, n’a pu informatiser ses institutions sans satisfaire à ce
préalable organisationnel.
2.
L’Etat devrait, courageusement et
de façon volontariste, promouvoir les NTIC dans le pays, à travers des
programmes standards d'investissement dans les infrastructures et les
logiciels, d'éducation scolaire, de formation et de promotion ; ces programmes
doivent être constamment mis à jour, à la lumière de l’évolution des
technologies ; l'État congolais devrait également réévaluer le statut de l’informaticien dans la fonction publique
qui, depuis les années 1970, fait de ce technicien un quelconque «
documentaliste » qui, le long de toute sa carrière administrative, broie du
noir et, avec beaucoup de chance, termine sa carrière sur un plafond de 300 USD
de salaire mensuel et, une fois mis à la retraite, touche au mieux 15 USD de
rente viagère mensuelle !
3.
L’Etat se doit également, par
l'informatique, de réguler les "bases référentielles communes" de la
meilleure manière, aux fins d’identifier, à tous les niveaux et dans tous les
coins, les entités morales et les habitants du pays : des élections
transparentes, des prélèvements fiscaux et douaniers, la planification
sanitaire, démographique et sociale, et une administration efficace sont
entièrement à ce prix.
La traçabilité, la transparence et redevabilité républicaine de la
gouvernance publique en RDC sont des défis frontaux.
III
PERSPECTIVES ET
RESPONSABILITÉS
Nous venons de présenter quelques applications sectorielles des NTIC
(agriculture éducation, PME, Finances et Gouvernance étatique). De même, nous
avons analysé quelques expériences africaines, mettant en lumière des avancées
(plutôt timides et lacunaires) : le cas de la RDC est demeuré à l'arrière-plan.
Une conviction doit s'être dégagée : les NTIC sont susceptibles de jouer un
rôle déterminant dans la transformation de l'économie et de la société,
notamment par une capacité accrue de prévision, d'anticipation et
d'organisation. Mais dans toute démarche qui se veut structurante (et
innovatrice !), il y a des prérequis incontournables, des étapes à suivre et
une méthodologie d’approche appropriée. La maîtrise de toutes ces exigences est
tributaire de la volonté politique de changer le destin collectif. Une fois de
plus, « tout est dans la méthode »,
tel que le proclame un dicton propre à la profession scientifique :
1.
Les NTIC sont certes rien moins
qu'un instrument ; mais derrière elles, se dresse une dure épreuve de
civilisation : vivre ou disparaître. Désormais, les sociétés humaines ne
pourraient survivre longtemps avec, au plan de leur gouvernance, des postures
réactives en tous sens, opportunistes et à courte vue, principalement dictées
par le réflexe d'auto-défense des intérêts privés étroits. La RDC doit se doter
d’une vraie vision.
2.
Les NTIC représentent une
plateforme de créativité et d’innovation. La production, les échanges, la
consommation, la compétition et la reproduction sociale
en sont désormais marqués. Ne pas exister sur le web est suicidaire. La RDC a beaucoup à faire, notamment récupérer
sur la toile le label « .cd », label géré à ce jour sur les points de change sud-africains. Le pays
doit rapidement développer ses propres
points de change, au bénéfice de son économie.
3.
Bien entendu, cette vision doit s’accompagner
d’une stratégie d’investissement (en énergie, infrastructures, équipements,
logiciels et expertises) et des politiques de régulation appropriées dont des
aspects ont été brièvement présentés ci-dessus. Chaque Ministère devrait
développer un plan d’investissements dans son secteur, en cohérence avec la
vision globale des NTIC.
4.
La révolution numérique implique
un cadre institutionnel centralisé, un point focal d’impulsion politique et de
supervision des stratégies d’implémentation chez tous les opérateurs
socio-institutionnels : État-régulateur, départements ministériels et autres
services publics, Banque Centrale, syndicats patronaux et ouvriers, opérateurs
économiques et sociaux, privés et publics, etc.
5.
Fût-ce par impératif de sécurité
et de progrès, l’Etat congolais est, de par la nature régalienne de ses
prérogatives, le responsable numéro un et le principal régulateur des NTIC. La
coopération avec le secteur privé, étranger et surtout national, reste
cependant incontournable autour d'un cahier de charges dressé par le même
pouvoir public.
6.
L’Etat doit s’affirmer également
par la mise en ligne des kiosques de services, utiles aux différents intérêts
catégoriels de la population. En RDC, le taux d’équipement des téléphones est à
50%, la télévision n’atteint pas encore 10% et la desserte en électricité est à
8%. Le réseau des NTIC le plus populaire reste donc le téléphone, qui continue
sa pénétration géographique et démographique (avec le plus fort taux de
pénétration chez les adolescents urbains et dans la population féminine
rurale).
7.
L’Etat congolais gagnerait à
mettre en place une plateforme gouvernementale intégrée, comme c'est le cas au
Kenya. Avec des passerelles appropriées, cette plateforme sera reliée aux
kiosques sectoriels (Santé, PME, Agriculture, Finances et Budgets...).
8.
Au total, il s'agit de mettre en
place tout un écosystème qui prend en compte les besoins de développement de
toutes les franges de la population. La première étape serait la mise à
disposition de l’information la plus complète dont a besoin chaque entité
morale ou groupe physique de recourir aux administrations. La seconde étape
serait pour les administrations de rendre disponibles les documents, les formulaires,
les procédures et les circuits administratifs exigés pour l'éligibilité des
administrés aux services publics souhaités. La troisième serait bien entendu la
création des plateformes d’échanges et de services entre tous les acteurs de
l’économie.
9.
Enfin, l'utilisation des NTIC
étant dynamique, il est impératif que les services de l’Etat soient dotés d'un
"centre de veille technologique", destiné à répondre aux besoins de
techniques, à localiser les utilisateurs et à adapter l’utilisation des techniques
à la réalité locale. Par exemple, les opérateurs pionniers du GSM en Afrique
n’avaient pas pensé au transfert de l’argent par le téléphone. Mais, grâce à la
recherche et aux spécificités locales en Afrique subsaharienne, cette région du
monde reste aujourd'hui la première dans ce domaine à travers le monde. Autre
exemple. Les pays européens n’arrivaient pas à bien réguler entre eux le roaming, il y a 10 ans. Cela n'a pas
empêché l’Afrique noire à être la première région à créer le concept et à le
matérialiser sur le terrain. "One
network" (un seul réseau pour plusieurs pays) : cette idée à démarré
en laboratoire à Kinshasa en 2003. À l'origine, c'était des ingénieurs
congolais de télécoms qui ont lancé l'idée de connecter Brazzaville et Kinshasa
dans un seul réseau. En matière d'innovation, l’espoir semble permis de toutes
parts !
Point n’est besoin de dresser une liste exhaustive des modalités
d'utilisation des NTIC par les "pays en développement". Les défis du
Congo sont certes, pour une très large partie, ceux communs à ces pays ; mais
ils demeurent spécifiques sur certains aspects liés à l'histoire, à la
géographie, à la démographie, à la sociologie et à la culture. La brève analyse
qui précède a été dirigée sur quelques défis à la fois généraux et spécifiques.
Et l'impression s'est dégagée selon laquelle le Congo figure parmi les pays les
moins avancés en ce domaine et, bien au-delà, parmi les moins préparés et les
moins dotés de volonté politique au sujet des NTIC.
Et pourtant, la grande dimension géographique de ce pays et son
exceptionnelle diversité socioculturelle appellent prestement l'intégration
nationale, et rendent impérieux le recours aux facilités qu'offrent les NTIC
aux coûts les plus faibles connus à ce jour. L’édification d’un espace territorial
solidaire respirant à un même rythme, économiquement et socialement, est plus
que jamais un défi quotidien face à la mondialisation et à ses différents
aléas. En particulier, les différentes frontières du pays sont poreuses et à
peine sécurisées, les particularismes locaux trop prononcés, les velléités
séparatistes internes et les tentatives extérieures de balkaniser le territoire
congolais trop menaçantes. La consolidation économique de cet espace et la
solidité des nœuds informationnels qui permettent de penser et gérer cet espace
comme une seule entité, représentent une question de survie collective. À elles
seules ne suffisent pas −
et ne suffiront probablement jamais ! − la densité et la
capillarité des communications par voies routières, ferroviaires, fluviales,
lacustres, maritimes et aériennes. Dirigeants politiques, monde des affaires
congolais, scientifiques, intellectuels
et leaders d'opinions, ont donc, parmi les questions prioritaires d'édification
nationale, celle d'exploiter à fond les innombrables atouts liés aux NTIC. Ils
ont l'obligation d'y parvenir par des approches judicieusement intégrées et
coordonnées dans la gouvernance-même du pays.
Dans cette perspective, les NTIC peuvent être employées comme
l’exosquelette qui permet de décupler la résistance aux forces centrifuges, à
l’inertie d’une économie de rentes naturelles extravertie, à la trop forte
dépendance extérieure, à la précarité socio-économique interne, et à
l'impuissance des institutions et de l'État. Le progrès des NTIC devrait
également atténuer le ressenti qu'a la population congolaise de la faiblesse de
sa cohésion face à l'insécurité qui menace le pays et l'État, de l'intérieur
comme de l'extérieur.
Mais, un certain contexte est incontournable, avant comme pendant le
déclenchement d'une telle dynamique. En voici une expression synthétique :
"classe moyenne autochtone et
électricité". Tout destin national souhaitable est englobé dans cette
formule lapidaire. En effet, elle sous-entend un marché domestique qui
s'élargit − et forcément se diversifie
! − sous les dynamiques suivantes : (i) mobilisation de
ressources internes et création d'emplois mieux rétribués, (ii) progrès et
diversification de la production, (iii) niveau et qualité de la vie pour une
majorité qui s'élargit, (iv)
puissance et sécurité collectives, et, au
début comme à la fin de tout, (v) gouvernance politique informée et
proactive. Tous ces progrès sont appelés à baigner dans un rouage sociétal complexe,
mais peu opaque et lubrifié par les NTIC. La dynamique des intérêts
individuels, des institutions publiques et des organisations privées aura pour
résultante "naturelle" la garantie des libertés, la protection des
droits humains et la sauvegarde de la biodiversité : trois cerises sur un
gâteau consistant, celui du progrès économique, social, culturel équitablement
partagé.
À l'intention des esprits congolais qui s'affichent
"pragmatiques", il est nécessaire de présenter autrement ces
exigences et ces processus. De tels esprits n'appréhendent les choses que sous
l'angle de leur faisabilité "concrète" sur terrain : la "feuille
de route" leur tient lieu de clef de compréhension. La régulation sociale
doit cesser d'être suspendue à la bouche du commissaire
priseur anonyme des marchés de NTIC. L'État congolais doit se hisser aux
avant-postes. C’est dire que la régulation des Postes et Télécommunications, confiée à l’ARPTC (Autorité de Régulations des Postes et
Télécommunications Congolaises), cesse d'être une timide caisse
d'enregistrement et d'arbitrage des choix décisifs que font des firmes privées
étrangères de télécommunications. Il faut que l'ARPTC cesse d'être un guichet
public où se vendent aux firmes les plus offrantes des "longueurs
d'ondes" et des "bandes de fréquences" et où s'arbitrent des
querelles de tarification et d'interconnexion. L'ARPTC doit devenir, bien au
contraire, un des centres névralgiques de la stratégie nationale de développement,
où devrait se lire la norme de la gouvernance politique en matière de NTIC et,
par delà, l'esquisse du destin collectif que l'État s'emploie à bâtir. En ce
sens, une loi nationale doit être promulguée, faisant de l'ARPTC, non pas un
banal guichet à l'affût de quelques miettes fiscales, mais une "Autorité
nationale" chargée de réfléchir aux meilleurs choix politiques et
techniques en cohérence avec le contenu sociétal et la position géostratégique
que le pays s'efforce de conquérir.
Contrairement aux préoccupations matérielles à très court terme qui
commandent ses réflexes et l'éloignent des choix critiques, le gouvernement
congolais devrait avoir l'audace d'affronter la responsabilité des choix
sociétaux fondamentaux à travers les NTIC, et cesser d'abandonner cette
responsabilité à des firmes privées étrangères dont les intérêts sont en
compétition entre eux, et naturellement en conflit avec ceux du pays. Pour ce
faire, le gouvernement doit agir comme puissance
régalienne. La sécurité collective, les libertés et les droits humains,
ainsi que l'impératif de progrès social devraient commander ses choix
souverains en matière de révolution numérique. Ses choix doivent être, en
définitive, des choix démocratiques, c'est-à-dire âprement discutés dans les institutions
et dans l'opinion.
Le Ministère en charge des Postes,
Télécommunications et Nouvelles Technologies de l'information et de la
Communication, a donc le devoir d’élaborer un plan de développement
cohérent des NTIC, et à le faire adopter et promulguer comme une loi-cadre. Un
projet de loi sur les Télécoms est en souffrance depuis plus de 3 ans : on peut
parier qu'à ce jour, elle est à élargir et à dépoussiérer, pour prendre en
compte les évolutions techniques et juridiques récentes. En effet, les risques d’instabilité juridique sur
l’avenir du cadre des NTIC en RDC sont nombreux (Lire Ndukuma Adjayi Kodjo
: Cyberdroit ; Éditions des PUC,
Kinshasa 2009,). Il faut éviter au pays le risque d'être la paria de la
révolution numérique, et de sortir ainsi de l'histoire que d'autres nations
tissent à la barbe de tous les Congolais.
Déjà, la loi de 2002 sur les télécoms, portant création de l’ARPTC, est
à ce jour dépassée par l'évolution des enjeux technologiques intervenue au
cours des 15 dernières années. Garder en vigueur une telle loi revient à
exposer le pays au risque majeur d'être la paria de l’économie numérique mondiale.
Les gouvernants d’aujourd’hui ont le devoir, pour le développement des
populations, de repenser les NTIC comme
un secteur stratégique et de les faire sortir des domaines à caractère
réglementaire (Constitution, Article 122). En effet, les NTIC se sont imposées
comme une matière transversale et structurante, déterminante dans les processus
modernes d’accumulation des richesses, régissant l'innovation dans toutes les
chaînes de valeurs... Il est grand temps que les gouvernants africains et plus
spécialement ceux de la RDC sortent de la 1ère partie du siècle
dernier.
Nous assistons à une augmentation rapide du nombre d'accès à l'internet
"haut débit", par exemple
avec l'ADSL ou avec les réseaux de télévision par câble. Fournissant un accès à
l'internet " très haut débit",
les réseaux en fibre optique ont favorisé une plus large diffusion de données
audiovisuelles à des prix abordables et (la concurrence et l'innovation aidant)
constamment à la baisse. Ces innovations technologiques semblent avoir tout
bousculé sur leur passage, spécialement dans les pays développés. Les BRICS ne
sont pas totalement à la traîne et, avec eux, quelques pays d’Afrique
sub-saharienne. Le Kenya, le Ghana, le Sénégal, le Nigeria - pour ne citer que
ceux là - se sont engagés dans la démarche manifestement volontariste. Au lieu
d'attendre les premiers pas hésitants et calculés des investisseurs privés
étrangers, les décideurs politiques ont pris les devant. Ils se sont d'abord
efforcés de se donner une vision propre sur la révolution des NTIC et sur la
manière de se l'approprier avantageusement. Ensuite, ils ont créé des services
nationaux et réalisé de lourds investissements publics essentiellement dans les
infrastructures et les équipements, attirant ainsi les privés qui sont venus faire
de l'argent, mais qui n'en évoluaient pas moins dans la vision déjà tracée par
les gouvernements hôtes.
Avec l'avènement du WEB 2.0, les usages des NTIC se sont développés,
surtout chez la grande majorité des citoyens des pays industrialisés. La fracture
numérique géographique s'est développée d'avec les pays en développement, où
l'accès à internet "haut débit" est hors de la portée de la grande
majorité des populations.
Cette poussée de l'économie
numérique a pris les allures d'une « révolution silencieuse »* en
RDC. Mais elle hésite encore à s'investir dans une vision globale, et à prendre
des contours précis dans ce pays immense et dans cet environnement
technologique mondial où le changement paraît être la seule réalité permanente.
Depuis le début des années 2000, la RDC tarde à franchir le pas décisif vers le
« renversement de tendance »*. La veillée d'armes dans l'inévitable
lutte contre un chômage envahissant, la mono-exportation minière, la fragilité
et la non-inclusivité de la croissance, le rétrécissement relatif du marché
intérieur, ... se prolongent de façon à en rajouter aux impatiences qui se font
déjà sentir ça et là. L'assaut ne se fera pas sans une vision nationale précise
et opportuniste sur la façon dont le pays devrait s'inscrire dans la
"révolution silencieuse" des NTIC.
BIBLIOGRAPHIE
SOMMAIRE
N°
|
AUTEUR (ou WEBSITE)
|
TITRES ET AUTRES RÉFÉRENCES
|
01
|
BANAMOU, Françoise
|
L’économie de de
la culture :5èmeEd., Editions La Découvert, Paris 2004.
|
02
|
BIRNBAUM, Jean (dir.)
|
Où est passé le
temps ?; Ed.Gallimard,
Paris 2012.
|
03
|
BRENER, Neil
|
« Urban Governance and the production of new
spaces in western Europe 1960-2000, Review of International Political
Economy, Vol 11 n°3, London, August 2004.
|
04
|
BUKASA Ambroise
|
Le Blocage des
télécommunications au Congo-Zaire, Ed. L’Harmattan, Paris 2012.
|
05
|
DALBERG REPORT
|
Establishing
conditions for succes and catalysing inclusive growth in Ghana, Kenya,
Senegal and Nigeria ; Dakar ,2013.
|
06
|
EASTERLY, William
|
Les pays pauvres
sont-ils condamnés à le rester ?; Ed. Nouveaux
Horizons ; 4è édition, Paris 2013.
|
07
|
FAYON, David
|
Géopolitique d’Internet
– Qui gouverne le monde ?, Ed. Economica, Paris
2013.
|
08
|
KABEYA TSHIKUKU, Albert
|
La Résilience
économique : Qu’attendre des TIC; in <revue
congolaise de politique économique (RCPE), Vol. 1 n°1, Kinshasa, mars 2015.
|
09
|
KABEYA TSHIKUKU, Léonard A.
|
Les NTIC dans la
construction nationale – Une révolution silencieuse ; Kinshasa, avril 2008 – (Communication à la Journée Internationale
des Télécommunications)
|
10
|
KABEYA TSHIKUKU, Léonard A.
|
Les nouvelles technologies
de l’Information et des communications dans la construction nationale – Une révolution
silencieuse ; Lettre Mensuelle de l’IRES, UNIKIN,
Kinshasa 2013.
|
11
|
KÄ MANA
|
La R.D. Congo est à inventer ; Ed. Le Potentiel ;
Kinshasa 2008.
|
12
|
MBAUNEWA Nkieri, Albert
|
Droit Congolais
des télécommunications, Etats des lieux, Analyse et critique comparative ;
Ed. Juricongo,2012.
|
13
|
NETSUD
|
«TIC et accès des ruraux à l’information : l’exemple
du XamMarsé de Manobi au Sénégal», in Cahiers
de Nestud, mai 2013.
|
14
|
NKUDUMA Adjayi Kodjo
|
Cyberdroit,
Télécoms, Internet, Contrats de e-commerce ;
Presses Universitaires du Congo ; Kinshasa, 2009.
|
15
|
OMS – Cloud Standards Customer Council
|
Impact of Cloud
Computing on Healthcare ; November 2012.
|
16
|
OMS – WHO Health Statistics
|
A survey of
subsaharan Medical School : http:/www.human-ressources-health.com/conten/10/1/4)
|
17
|
PILLOU, Jean-François & CAILLEREZ, Pascal
|
Système d’Information ;
Ed.Dunod, Paris 2011.
|
18
|
PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE (Journal Officiel de la RDC)
|
Loi cadre
N°014/2002 du 16 octobre 2002 portant création de l’Autorité de Régulation de
la Poste et des Télécommunications ; Kinshasa, 2002
|
19
|
VOLKER, Walter V.
|
Essential Guide
to payments ; Ed. Veritas Book, NY 2013
|
20
|
WATSON, Richard
|
50 ideas you
really need to know the Future ; Quercus, NY
2012
|
Texte parue sous forme d'article scientique dan la revue Universitaire M.E.S (Mouvements et Enjeux Sociaux), Université de Kinshasa, n°100, juillet-septembre 2017, pp.5-24.